El Quimbo

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Contexte général

Le futur méga-complexe hydroélectrique El Quimbo qui se situera dans le département du Huila en Colombie sera construit sur le fleuve Magdalena, le plus important du pays. Le complexe se situera en plein cœur de la réserve forestière d’Amazonie protégée par la loi 2 de 1959. Au coût de 700 millions $, le projet d’une capacité estimée à 400 MW devrait être complété en 2014. L’ensemble du complexe s’étendra sur une superficie de 8 586 Ha (85,86 Km²) et inondera 8 250 Ha (82,5 Km²) de terres.
Ce projet s’inscrit dans la nouvelle politique nationale de développement du gouvernement d’Alvaro Uribe Velez : le «Plan 2019/ Visíon Colombia II Centenario». Cette politique ouvre la porte à ce tout premier projet entrepris exclusivement pour et par le secteur privé. Elle autorise également le gouvernement à garantir à l’investisseur un revenu fixe indépendant de sa participation quotidienne dans les marchés pour une durée de 20 ans.
El Quimbo s’inscrit également dans l’Initiative d’intégration de l’infrastructure régionale d’Amérique du Sud (IIRSA) et dans le cadre du Plan Puebla-Panama (PPP). En effet, l’électricité produite est destinée à l’exportation vers les pays voisins, notamment vers l’Équateur.
Acteurs principaux
Endesa (Empresa Nacional de Electricidad S.A.) est une multinationale espagnole établie depuis plusieurs années en Europe. C’est la troisième entreprise d’électricité en Europe et la première en Espagne et en Amérique Latine. En 1997, elle s’est portée acquéreuse du barrage hydroélectrique Betania, situé à quelques kilomètres en aval du futur complexe El Quimbo, par l’intermédiaire de sa filiale colombienne Emgesa. La même année, elle tente sans succès d’obtenir auprès du ministère de l’Environnement une licence environnementale pour El Quimbo. Le ministère considérait alors que les conséquences environnementales seraient trop importantes et que l’étude d’impact déposée par l’entreprise était insuffisante.
Depuis 2008, Endesa est accusée par le Tribunal permanent des peuples de Colombie de violations des droits humains et de pratiques nuisibles à l’environnement.
Plataforma Sur de Organizaciones Sociales (PSOS ou Plataforma Sur) est une coalition regroupant des organismes non-gouvernementaux et des groupes sociaux de la société civile. Cette coalition souhaite établir un agenda politique, économique et social bien différent de ce qui est promu par le gouvernement Uribe pour la région Sud du pays.
Respect des droits humains, démocratie, gouvernance locale, justice et équité, genre et développement, écologie… sont à la base de leurs revendications. La PSOS se présente à ce jour comme étant le principal mouvement d’opposition au projet El Quimbo dans le Huila.
La Procuraduría General est un organisme gouvernemental chargé de veiller à ce que soient appliquées la loi et la constitution colombiennes. Elle fait la promotion des droits fondamentaux, des devoirs citoyens et protège le patrimoine public. Cet organisme public s’est opposé à ce que le ministère de l’Environnement octroie la licence environnementale 0899 du 15 mai 2009 à Emgesa. C’est cette licence qui autorise l’entreprise à entreprendre ce projet sur la zone forestière protégée de l’Amazonie.
La CAM est un organisme public qui a la responsabilité d’administrer les ressources naturelles et environnementales de la région du Haut Magdalena. Cette région renferme un écosystème unique. C’est donc dans le but de le protéger qu’a été créé en 1993 cette entité dotée d’une autonomie administrative et financière. La CAM a joué un rôle très important lors des tables de concertations précédant l’octroi de la licence environnementale à Emgesa. Lors de ces rencontres, elle semblait toutefois plus intéressée à négocier le prix que l’entreprise devrait lui payer par hectares détruits qu’à négocier des alternatives écologiquement viables. Ariel Borbon, directeur de la CAM, a d’ailleurs admit que la licence environnementale ne compenserait aucunement les dommages causés à l’environnement.
Le ministère de l’Environnement, du Logement et du Développement territorial a joué un rôle clé dans tout le processus qui permet à Emgesa de se lancer dans la construction d’un méga-complexe hydroélectrique dans une zone protégée. Il avait refusé d’accorder la licence environnementale à Emgesa en 1997 pour le même projet à qui il donne maintenant son aval. En effet, la licence 0899 du 15 mai donne le droit à Emgesa d’aller de l’avant avec la construction du méga-complexe El Quimbo, sous certaines conditions explicitées dans ce document. Le 24 août 2009, le ministère a adopté une résolution contraignant Emgesa à honorer les termes de la licence 0899.
L’Incoder est un organisme public lié au imnistère de l’Environnement. Il est en charge d’exécuter les politiques de développement rural en collaboration avec les communautés, les institutions publiques et privées liées au secteur agroalimentaire, des pêches et des forêts.
Conséquences principales
  • Les habitants des municipalités de Garzón, Gigante, Altamira, El Agrado, Paicol et Tesalia seront directement affectés par les inondations.
  • Près de 1 500 personnes seront déplacées et devront être relocalisées.
  • Environ 2 000 Ha de terres cultivées et fertiles seront inondées.
  • Destruction de 8 entreprises communautaires dont les plus vieilles ont près de 40 ans.
  • Près de 842 Ha de forêts riveraines seront inondées. Une des dernières forêts tropicales sèches du pays sera également perdue.
  • Près de 95% du complexe se situera dans la réserve forestière de l’Amazonie. Celle-ci héberge présentement 103 espèces d’oiseaux, 13 espèces de reptiles et trois espèces de mammifères en voie d’extinction soit le pacarana, le singe nocturne aux mains grises et la loutre néo-tropicale.
  • Les communautés perdent la possibilité de revendiquer le respect de leurs droits fondamentaux et leur souveraineté sur ces terres.
  • Déplacement de 26% de la population rurale, d’où le risque d’un exode rural massif.
  • Impacts sur la santé publique et apparition de maladies liées à la pollution de l’eau ou du sol par le mercure
  • Diminution de la souveraineté alimentaire
  • Augmentation de la pauvreté et des inégalités entre pauvres et riches
  • Diminution drastique de l’accès à l’eau et de sa qualité
  • Destruction de l’environnement et menace pour la biodiversité et l’écosystème
  • «Développement» anti-démocratique
  • Conflits intra et intercommunautaires
  • Marginalisation économique
Historique du projet
Le projet hydroélectrique El Quimbo a été déclarée d’utilité publique en faveur d’Emgesa, par la résolution 321 du premier septembre 2008, demande traitée préalablement devant le ministère des Mines et de l’Énergie. Le Décret explique que la Direction d’ethnies du ministère de l’Intérieur et de la Justice a certifié que dans cette région ne sont enregistrés ni communautés indigènes ni afro-descendants qui pourraient être touchées par le développement du projet. Pour sa part, l’Incoder a certifié que le projet “n’intervient pas légalement sur des territoires légitimes indigènes ou des terres des communautés noires”. (Journal du Huila)
Depuis l’adoption de la résolution 321, les différentes communautés du Huila ont organisé plusieurs manifestations dans les villes de la région.
Avec l’appui du plus grand syndicat du pays, la Central Unitaria de Trabajadores de Colombia, des citoyens, des étudiants et des professeurs de la Universidad Sur Colombiana (USCO),des organismes environnementaux et la coalition Plataforma Sur de Organizaciones Sociales (PSOS) ont systématiquement participé aux rassemblements.
En décembre 2008, un groupe de jeunes a entrepris une marche de deux jours au travers des 55 km de ce qui pourrait devenir le réservoir du barrage afin de discuter avec les habitants des conséquences d’un tel projet.
Depuis le début de l’année 2009, 4 tables de concertationsont eu lieu. Ces rencontres, où médias, ONGs et représentants de la société civile étaient exclus, avaient pour but de trouver un terrain d’entente qui conviendrait aux 22 acteurs en présence.
Le ministère de l’Environnement a convoqué une audience publique le 12 février 2009. À cette date, la décision d’aller de l’avant avec le projet El Quimbo ne semblait toutefois plus dépendre du soutien de la population.
Le 15 mai 2009, le ministère a finalement cédé à la pression des acteurs en faveur du projet et a octroyé à Emgesa la licence environnementale nécessaire à la mise en chantier du complexe.
La PSOS a déposé un recours judiciaire afin de forcer les autorités concernées à réévaluer le bien fondé de l’octroi de la licence 0899.
L’équipe juridique de la PSOS se fonde sur les sept arguments suivants:
  • La décision du ministère d’octroyer la licence environnementale pour El Quimbo contredit le principe de développement durable.
  • L’adoption de la résolution est une atteinte à la biodiversité du pays puisque 95% d’El Quimbo se situera dans la réserve forestière d’Amazonie protégée par la loi 2 de 1959.
  • Elle détruit également des terres très productives du département du Huila.
  • Le ministère de l’Environnement n’a pas la compétence suffisante pour autoriser la destruction d’une partie de la réserve de l’Amazonie en retirant à celle-ci le statut de réserve forestière protégée.
  • Face à la précarité des études techniques et scientifiques, le ministère aurait dû appliquer le principe « in dubio pro ambiente ». Ce principe de précaution stipule qu’en cas de doute sur les conséquences réelles d’une action sur l’environnement, il faut préconiser celle qui la protège.
  • La licence autorise la destruction des espèces piscicoles du fleuve Magdalena.
  • Durant le processus administratif d’octroi de la licence environnementale, les autorités concernées ont omis de tenir compte du principe 20 de la déclaration de Rio sur l’environnement et le développement[1] (DRED). Celui-ci insiste sur l’importance de la participation des femmes dans des projets de développement durable. Elles ont également omis de tenir compte de l’article 1 de la loi 99 de 1993 concernant la protection de la biodiversité, du patrimoine environnemental et mettant en évidence l’importance d’un développement durable qui tient compte de la participation communautaire.

Le 22 mai 2010, le ministre de l’Environnement déclare qu’Emgesa assurera la majorité des compensations sociales, économiques et environnementales (compensations agricoles – octrio de terres et de bétail) qu’elle a promis aux populations affectées par la construction du barrage durant les tables de concertation avec elles. La principale modification de ces promesses concerne les hectares de restauration forestière. La proposition faite par Emgesa de faire toute la restauration forestière en une seule zone, voisine à la foret sèche, a été acceptée, plutôt que de la faire dans plusieurs zones isolées. Cela permettra, selon l’entreprise, une meilleure protection de la biodiversité et de la restauration de la foret sèche, qui est menacée d’extinction. La réduction de la zone sera compensée par le fait que les terres sur lesquelles seront faites la restauration seront acquises par l’entreprise qui construit le barrage, qui devra contrôler la zone, puis la remettre l’État.

Une autre ambition du projet El Quimbo est de développer un système de production piscicole dans la région, pour proposer une alternative économique aux opérations minières de la zone.

À ce jour, Emgesa a obtenu la licence environnementale pour lancer le projet El Quimbo.

Le 2 août 2010, les petits propriétaires affectés par la construction du barrage El Quimbo ont demandé la suspension du Manuel des Prix Unitaires approuvé le 23 mars 2010 par le ministère des Mines et de l’Énergie (résolution 180 480) pour la négociations des propriétés foncières et des indemnités versées pour les terres situés dans la zone d’influence du barrage. Les plaignant considèrent qu’Emgesa n’a pas reconnu leurs droits de copropriété et que l’article 9 de la loi 56 de 1981 sur la vente de terres reconnues d’utilité publique pour un projet n’a pas été appliqué.

Le 1er septembre 2010, la résolution 321 de 2007, qui déclare que les propriétés foncières de l’entreprise Emgesa sont reconnues d’utilité publique pour la construction du projet hydroélectrique El Quimbo, est entrée en vigueur.

Le 17 septembre 2010, la licence autorisant Emgesa à construire le barrage El Quimbo est modifiée par la résolution 1848 : le ministère de l’Environnement a cédé face aux demandes d’Emgesa et a accepté de baisser les compensations environnementales et sociales que l’entreprise devrait payer pour avoir le droit de construire le barrage.

Le 30 mars 2011, la Défense du Peuple (en Colombie, la Défense du peuple est une entité publique représentée aux échelles nationale, départementale et municipale, chargée de veiller à la promotion, à l’exercice et la mise en avant des droits humains) demande au ministère de l’Environnement d’ordonner la suspension de la licence environnementale accordée à Emgesa avant le 15 avril. Le 12 mai 2011, c’est au tour des communautés affectées par le projet de barrage El Quimbo d’exiger que le ministère de l’Environnement suspende la licence environnementale et le chantier du barrage, au vu de la non-conformité de la licence environnementale à la résolution 0899 du 15 mai 2009.

Le 4 avril 2011, le doyen de l’université Surcolombia, Miller Dussán, a demandé un droit de pétition pour informer les citoyens sur les découvertes archéologiques faite sur le chantier de El Quimbo, et pour lancer une enquête afin de déterminer si la soustraction de ces découvertes archéologiques a été entachée d’irrégularités et pour évaluer les dommages environnementaux causés sur la zone du projet hydroélectrique El Quimbo. Le Sénat a donc demandé au ministère de l’Environnement de rendre un rapport sur l’impact environnemental du projet. Deux mois plus tard, c’est au tour du ministère de la Culture d’ordonner à l’Institut Colombien d’Anthropologie et d’Histoire (ICAH) d’enquêter sur le cas d’extractions de vestiges archéologiques sur la zone de construction du barrage El Quimbo.

Le 8 juin 2011, 136 pêcheurs et leurs familles, privées de leurs ressource de travail par le projet de barrage El Quimbo – car la construction du barrage fait fuir les poissons (déplacement de beaucoup de terre dans la rivière Magdalena, usages d’engins a moteurs dans la rivière…) – ont décidé d’occuper le chantier du barrage pour bloquer son avancée.

Ils exigent, à travers la demande de pétition envoyée par Miller Dussán, que le ministre de l’Environnement respecte la loi en publiant l’acte administratif sur la gestion sociale d’Emgesa et en suspendant la licence environnementale du barrage El Quimbo. Durant l’occupation du chantier par les pêcheurs, des charges explosives ont été utilisées dans la zone de construction du barrage par des ouvriers, mettant en danger les pêcheurs.

Le 14 juin 2011, le ministère de l’Environnement, par la résolution 1096, et la CAM (Commission Autonome du Haut Magdalena), par la résolution 1 349, ont ordonné à Emgesa d’arrêter d’acheter et de négocier l’achat des propriétés foncières des communautés vivant sur la zone de construction du barrage, car l’achat de terrains entraîne des impacts non prévus dans l’étude d’impact environnemental du projet du barrage. Malgré les déclarations de la Défense du Peuple, de l’ICAH et des résolutions du ministère de l’Environnement et de la CAM, Emgesa continue le chantier et les négociations d’achat des propriétés foncières. Mais dans le même temps, le directeur d’Emgesa a annoncé, en réponse à la suspension partielle de la licence environnementale du barrage par le ministère de l’Environnement, qu’il allait « respecter toutes les conditions requises pour l’obtention de la licence ».

Le 27 juin 2011, les pêcheurs de la zone menacés par le barrage ont donc décidé de rester indéfiniment sur la Zone pour la Défense du Droit collectif à la Protection et à la Préservation de l’Environnement, et ils ont décidé de lancer un droit de pétition pour réclamer que soit publié un acte administratif qui oblige Emgesa à suspendre le chantier du barrage El Quimbo comme mesure préventive protégeant leurs droits.

Lors de l’Assemblée générale d’Asoquimbo, qui s’est tenue le 10 juillet 2011, une série d’actions à mettre en oeuvre pour renforcer la résistance face au barrage El Quimbo a été approuvée, comme par exemple l’organisation d’une table de discussion avec le gouvernement sur la défense des droits humains et l’indemnisation des dommages causés aux communautés affectées par le projet hydroélectrique El Quimbo. Emgesa, l’entreprise en charge de la construction du barrage, ne sera pas conviée à cette table de discussion, car elle n’est pas considérée comme digne de confiance par les habitantEs opposéEs au projet. Les pêcheurs entrés en résistance voilà 38 jours réclament toujours la restitution de leurs biens, c’est-à-dire leur rivière. En effet, ils estiment que leur sécurité alimentaire est menacée par le barrage.

Trois sénateurs de la république, un documentaliste italien accompagnant la délégation italienne de la Campagne pour la réforme de la Banque mondiale, ainsi que des représentants du PNUD (Programme des Nations unies pour le développement), des représentants du mouvement « Rios Vivos », des représentants de Planeta Paz, des représentants de l’Institut latino-américain de droit alternatif, des représentants de la Commission des droits humains du Sénat et de la Commission secondaire de la paix de la Chambre des représentants, des représentants de Plataforma Sur, des représentants de l’OBSURDH (Observatoire sud-colombien des droits humains), et des représentants de la Défense région du Peuple étaient présent lors de cette assemblée.

Une nouvelle Assemblée générale d’Asoquimbo a été organisée le 20 juillet 2011 pour réitérer les réclamations des populations affectées par le barrage El Quimbo via la demande de pétition qui demande que soit publié un acte administratif obligeant Emgesa à suspendre le chantier du barrage et tous les projets associés au barrage, que les habitantEs ayant perdu leur logement, leur travail et/ou leurs terres reçoivent des compensations justes de la part l’entreprise et soient relogés de façon à ce que leur sécurité alimentaire soit assurée et que la cohésion sociale de leurs communautés soient conservée.

En date du 29 juillet 2011, cela fait 7 semaines que les pêcheurs campent sur le chantier du barrage El Quimbo pour bloquer l’avancée des travaux de l’ouvrage. Ils réclament un relogement digne et dans des conditions de vie dignes, avec la possibilité de conserver les modes de vie et de travail qu’ils avaient avant la construction du barrage, dans un environnement semblable à celui d’où ils ont été délogés par l’entreprise Emgesa. Récemment, le ministre de l’Environnement s’est rendu sur les lieux du chantier et a pu constater les irrégularités survenues pendant le processus de construction du barrage.

Le 1er août 2011, l’ICAH (Institut colombien d’anthropologie et d’histoire) a fait savoir au Congrès de la République qu’il a formellement entamé, via la résolution numéro 102, le processus de sanction envers les entreprises Emgesa et Constructora Maja pour infraction au régime de protection du patrimoine archéologique dans le cas d’extractions de pièces archéologiques en avril 2011 sur le site de construction du barrage El Quimbo.Paradoxalement, l’ICAH a modifié la décision de suspendre le chantier du barrage qu’il avait ordonné le 7 juin 2011 via les rapports 1746 et 1749.

Le 7 août 2011, les derniers habitants du village de Domingo Arias ont négocié leur indemnisation avec Emgesa et ont quitté leur village, qui sera inondé par le barrage El Quimbo et dont la majorité des maisons sont déjà détruites. CertainEs habitantEs attendent encore qu’Emgesa fasse des offres plus intéressantes pour le rachat de leurs terres, car pour l’instant elles ne sont pas assez conséquentes à leurs yeux.

Un débat a été convoqué au Congrès de la République le 16 août 2011 par le banc parlementaire de Huila. Le ministère de l’Environnement, convié à cette réunion, n’a pas répondu à l’invitation. Durant le débat, Asoquimbo a fait savoir que, pour elle, l’unique alternative au barrage El Quimbo est la suspension définitive de la licence environnementale du projet et la création d’une réserve paysanne agroalimentaire dans la région du Quimbo.

Asoquimbo a aussi proposé la création d’une Commission composée de représentants de la Commission des droits humains de la chambre des représentants, de la sénatrice Consuelo Gonzales de Perdomo, d’un représentant du Haut-commissariat des Nations unies, du délégué permanent du PNUD – Programme de développement des Nations unies – pour la région du Sud de la Colombie, du défenseur national du peuple, des ministres de l’Agriculture et de la Protection sociale et du conseil d’administration d’Asoquimbo. Cette commission aurait pour but de réaliser un contrôle et un suivi systématique du respect de la constitution politique de Colombie ainsi que des accords internationaux traitants de la protection des droits économiques, sociaux, culturels et environnementaux, et en particulier de l’environnement et du patrimoine culturel de la nation; d’informer les autorités compétentes et les organismes nationaux et internationaux de droits humains et d’accompagner les communautés affectées dans les processus de réclamations d’indemnisations pour les dommages causés par le projet hydroélectrique El Quimbo.

Suite à cette réunion, Asoquimbo a dénoncé la posture incohérente des membres du banc parlementaire du Huila qui ont débattu sur le projet hydroélectrique El Quimbo et qui ont, en majorité, approuvé les actes de l’entreprise Emgesa et du ministère de l’Environnement qui la soutient – même si une minorité a soulevé la question des fraudes survenues dans l’établissement de la licence environnementale du projet par Emgesa.

Le 22 août 2011 s’est tenue une Assemblée délégataire convoquée par le secrétariat du gouvernement départemental du Huila pour discuter de la problématique des pêcheurs de la région du Huila. Les membres présents à cette réunion – des représentants des pêcheurs, le Défenseur du peuple, le procureur environnemental et agraire du Huila, le maire et des fonctionnaires de Paicol, ainsi qu’Asoquimbo et des conseillers juridiques – ont exigé la reconnaissance de la légitimité de la lutte des pêcheurs pour la sauvegarde de leur habitat naturel, la reconnaissance de la rivière Magdalena comme un bien public et la reconnaissance de l’utilité publique et de l’intérêt social du travail des pêcheurs. La réunion a conclu les accords suivants : réaliser un sondage parmi les pêcheurs en résistance pour faire état de leurs besoins basiques en eau, nourriture, éducation et santé, et répondre à ces besoins ; le maire de Paicol Huila s’oppose au déplacement des pêcheurs par l’entreprise Emgesa et s’engage à faire son possible pour éviter la négation de leur droit légitime de protester ; demander au ministère de l’Environnement de répondre aux demandes légitimes des communautés, et demander au ministre de la Protection sociale d’être présent à la prochaine réunion du 29 août pour garantir l’indemnisation immédiate des populations.

La veille de cette réunion, Asoquimbo avait ratifié la désobéissance et la résistance civile pour la défense du territoire et des communautés affectées et le rejet de la politique du ministère de l’Environnement qui protègent les intérêts de l’entreprise transnationale Emgesa.

Le vice-ministre de l’Environnement, Carlos Castaño, s’est engagé auprès d’Emgesa à lever les sanctions qui pèsent sur l’entreprise car « on ne peut pas entraver le développement du projet » de barrage El Quimbo. Les pertes financières dues à la paralysie de 70% du chantier s’élèveraient à plus de un million de dollars par semaine, selon l’entreprise.

Le 25 août 2011, les membres d’Asoquimbo se sont réunis en assemblée, en présence de délégués du Contrôleur général de la nation et de la CAM. L’assemblée a approuvé la mobilisation du 30 septembre 2011 sur le site de construction du barrage, ainsi que l’invitation à aller voter le 30 octobre pour la défense du territoire, de la rivière Magdalena, du massif colombien, de la biodiversité et des communautés affectées par le barrage El Quimbo, et pour la création d’une réserve agricole agroalimentaire.

Répression et intimidation

Craignant que le mouvement d’opposition ne prenne une trop grande ampleur et que les manifestations dégénèrent, les autorités policières ont augmenté leurs effectifs policiers dans plusieurs grandes villes de la région. La plupart de ces effectifs sont des policiers anti-émeute de l’Escadron Mobil Anti-Émeutes (ESMAD).

L’armée colombienne a également mis en opération, avec le soutien financier d’Emgesa, une base militaire à La Jagua, dans le département de Garzon. Cette base qui servira donc à protéger les investissements de l’entreprise aura coûté près de 55 millions de dollars; 60% de cet argent provient de fonds publiques et 40% de la multinationale espagnole.

Le groupe « Aguilas Negras » a mis en circulation le 23 juin dernier un pamphlet menaçant d’« objectif militaire » 14 personnes liées à USCO. Parmi celles-ci se trouvent le professeur Calderón et Fernando Charry Gonzales de la PSOS. Il est important de rappeler qu’Endesa-Emgesa est soupçonnée depuis 2008 d’être impliquée dans le conflit armé et que certains membres du gouvernement sont sans aucun doute liés à des groupes armés.
Impacts sur les droits humains [2]
La situation actuelle au Huila met clairement en évidence des violations aux droits suivants :
  • L’autodétermination
  • La protection contre les expulsions forcées
  • La liberté d’association et le droit à la négociation collective
Suite aux réactions des militaires et des paramilitaires, on peut craindre que soient bafoués les droits suivants :
  • La liberté d’opinion et d’expression
  • La réunion pacifique
  • La liberté et la Le sureté de la personne
Si le projet est mené à terme, il existe des bonnes raisons de croire que les droits suivants seront affectés :
  • Le droit à un niveau de vie suffisant (eau, nourriture et logement)
  • Le droit au travail librement choisit

Projets alternatifs

Le projet alternatif « El Quimbo Huilense » fut la première proposition. Ce projet reconnaît que les besoins énergétiques de la région peuvent être comblés par l’hydroélectricité. Le barrage qu’i propose serait toutefois de plus petite envergure, il inonderait 3 600 Ha et irriguerait plus de 148 000 Ha, pour générer 200 Mw. Il ne serait destiné qu’à la consommation locale et serait de propriété publique. Se basant sur la notion de développement durable, le projet alternatif tiendrait compte de la participation communautaire, il chercherait à stimuler les initiatives locales par l’établissement de coopératives et veillerait à la création de zones protégées.

Devant l’incertitude de la fiabilité du projet, une autre alternative a également vu le jour et sera étudiée avec les communautés affiliées à ASOQUIMBO. Le but serait de transformer toute la région de El Quimbo en réserve agro-alimentaire par des subventions étatiques. On mettrait en place des secteurs d’irrigation prioritaire pour garantir la sécurité et la souveraineté alimentaires, l’accès aux ressources comme l’eau et la terre, la défense des économies locales et des unités productives des petits et moyens producteurs, le droit au travail, la préservation des écosystèmes stratégiques, la participation des communautés dans l’élaboration et la vérification des plans, de programmes et de projets qui assurent un développement humain durable.

Cette proposition de développement éco-social comptera sur la participation des paysans, des indigènes, des étudiants, des chefs de petites entreprises, des coopératives et des organisations sociales et environnementales comme expression claire de leurs engagements pour la défense du territoire, de la biodiversité et des communautés. La proposition a été discuté lors de la rencontre « Souveraineté Énergétique et Alimentaire Durable » qui a eu lieu les 5 et 6 novembre 2009.



[1]
« Les femmes ont un rôle vital dans la gestion de l’environnement et le développement. Leur pleine participation est donc essentielle à la réalisation d’un développement durable. »
[2] Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels de l’ONU; Déclaration universelle des droits de l’homme de l’ONU; Normes internationales du travail de l’OIT.