HomeNouvellesEquateur: La Commission Spéciale pour la Vérité et la Justice juge que les agressions d’octobre 2019 peuvent être qualifiées de crime contre l’humanité

Equateur: La Commission Spéciale pour la Vérité et la Justice juge que les agressions d’octobre 2019 peuvent être qualifiées de crime contre l’humanité

Au terme de plus d’un an de travail acharné pour enquêter sur les manifestations d’octobre 2019, la Commission spéciale pour la Vérité et la Justice, créée par le bureau du Défenseur du peuple équatorien, a présenté le rapport final sur les événements survenus pendant les 14 jours de manifestations nationales qui ont eu lieu en octobre 2019 dans le pays.

Le rapport, qui a été présenté le mercredi 17 mars au Théâtre National Jaime Roldós Aguilera de la Maison de la Culture équatorienne à Quito, indique que la Commission a été créée par le Défenseur du Peuple, Freddy Carrión, dans le but d’analyser les événements de la grève nationale qui a eu lieu entre le 3 et le 16 octobre 2019.

Cette Commission pour la vérité était composée de : Sybel Martínez Reinoso (présidente), Juan Carlos Solines Moreno et Xavier Zavala Egas.

Le document indique que les événements ont eu lieu dans le cadre de la réponse aux demandes et mobilisations sociales contre les politiques économiques du gouvernement de Lenin Moreno, qui a promulgué  » de manière abrupte  » le décret exécutif n° 883, sans aucun consensus avec les secteurs concernés et sans en prévoir les conséquences. « La réaction du gouvernement à la réponse sociale a été encore moins réfléchie« , note le rapport.

Il souligne également que l’enquête de la Commission est basée sur une approche impartiale et fondée sur les droits, dans laquelle 519 témoignages ont été analysés, dont 249 correspondent à des violations des droits humains par des agents de l’État.

Selon les commissaires, dans le rapport de 272 pages sont détaillés des cas d’exécutions extrajudiciaires présumées, des blessures physiques et psychologiques, des personnes ayant perdu un œil et présentant des lésions permanentes dues à l’impact de bombes lacrymogènes, de plombs ou d’objets contondants.

Outre ces cas, est mise en évidence la violation du droit à l’intégrité personnelle et à la santé, ainsi que certaines blessures physiques causées par des agents de la Police Nationale et des Forces Armées qui, par leur gravité et leur récurrence, pourraient être qualifiées d’élément d' »attaque généralisée » contre la population civile, de sorte qu’il est demandé aux autorités judiciaires de mettre l’accent sur l’analyse des preuves menant à un possible crime contre l’humanité.

Il est noté que le gouvernement de Lenin Moreno a justifié ses actions par un discours qui cherchait à installer dans l’imaginaire social des ennemis possibles et assimilait les délits de droit commun à des violations flagrantes des droits humains.

Cas mentionnés

Selon le rapport de la Commission, pendant la grève nationale, certains cas d’abus de pouvoir ont entraîné la mort de plusieurs personnes, comme les cas de Marco Humberto Otto Rivera, José Daniel Chaluisa Cusco, Édison Eduardo Mosquera Amagua, Segundo Inocencio Tucumbi Vega, Édgar Yucailla Álvarez, entre autres.

Des violations du droit à l’intégrité personnelle ont également été enregistrées, notamment dans les cas d’agressions contre Juan Álvaro Olovacha Tubón, Omar Giovanny Mosquera Enríquez, Laura Carrión de la Torre, entre autres, dans un quartier de la ville d’Ibarra.

Par ailleurs, des citoyen.ne.s ont été blessé.e.s aux yeux, comme c’est le cas de : Diego Francisco Chuquiguanga Pintado, Luis Alfonso Tipantuña Bautista, Darwin Roberto Farinango Collahuazo, Pablo Uquillas Coba, entre autres.

Le rapport relate également des cas de violences sexuelles, d’attaques contre des journalistes, de détentions illégales ou arbitraires de ressortissant.e.s vénézuélien.ne.s et de traitements cruels, entre autres.

Conclusions et recommandations

Parmi les principales conclusions, la Commission constate que l’État équatorien, par l’intermédiaire de ses agents, a gravement violé les droits à la vie, à l’intégrité physique, psychologique et sexuelle, et à la liberté individuelle.

Elle a indiqué que le discours des autorités gouvernementales a présenté une interprétation partielle de la réalité, mettant l’accent sur certains acteurs violents et un programme de déstabilisation qui a développé dans l’imaginaire social l’idée que la démocratie était attaquée.

Par ailleurs, il est précisé que suite aux événements le gouvernement a justifié la répression des citoyen.ne.s dans le but de maintenir la stabilité politique du régime et de la démocratie. « Cette position officielle visait à délégitimer la protestation sociale, et les motivations structurelles et circonstancielles légitimes présentes chez la plupart des acteurs mobilisés« .

De même, le gouvernement, par l’intermédiaire de ses ministres, a justifié ces actes répréhensibles commis contre les manifestant.e.s, par exemple, l’attaque des zones de paix dans les installations universitaires de la capitale.

Parmi les principales recommandations, la Commission a exhorté l’État à fournir les outils juridiques pertinents afin que les forces de sécurité et de maintien de l’ordre agissent dans le cadre de toutes leurs fonctions dans le strict respect des droits humains, de sorte que leurs actes de service répondent aux principes de légalité, de nécessité, de proportionnalité, de précaution et de non-discrimination.

Le rapport de la Commission pour la Vérité et la Justice indique également que l’État doit promouvoir la protection des droits humains par le biais de règles claires qui permettent l’usage progressif, rationnel et différencié de la force par les forces de l’ordre, conformément aux normes internationales de protection des droits humains.

La Commission a également demandé à l’État équatorien, par le biais de son plus haut représentant, de présenter des excuses publiques aux victimes de violations des droits humains survenues lors de la grève nationale d’octobre 2019.

L’événement a été suivi par le Défenseur du peuple, Freddy Carrión Intriago ; le Secrétaire du Bureau du Défenseur du peuple, Cristhian Bahamonde Galarza ; la Présidente de la Commission spéciale, Sybel Martínez Reinoso ; les Commissaires Juan Carlos Solines Moreno et Xavier Zavala Egas ; ainsi que les victimes de violations des droits et leurs familles.

Le bureau du Défenseur du peuple a reçu le rapport de la Commission spéciale et agira, conformément à ses pouvoirs, pour exiger la réparation intégrale des victimes de violations des droits humains lors des manifestations nationales d’octobre 2019, « car seulement avec la vérité et la justice et en disant NON à l’impunité est garantie la construction de l’Équateur comme une terre de droits« , a déclaré le chef de l’entité, Freddy Carrion.

Source article et photo: Confirmado