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Lettre ouverte au parlement canadien sur l’assassinat massif de défenseur.e.s des droits humains en Colombie

Lettre ouverte au Parlement canadien

L’ASSASSINAT DE DÉFENSEUR.E.S DES DROITS HUMAINS EN COLOMBIE : QUEL RÔLE JOUE LE GOUVERNEMENT DU CANADA ?

Ottawa, le 14 juin 2019

Mesdames, Messieurs parlementaires, nous sommes présent.e.s ici, Colombien.ne.s, défenseur.e.s des droits humains pour crier en Colombie ILS ONT EN TRAIN DE NOUS ASSASSINER! Ils sont en train d’assassiner nos dirigeant.e.s, les défenseur.e.s des droits humains, de la vie des communautés, de l’eau, du territoire.

566 dirigeant.e.s sociaux et défenseur.e.s des droits humains ont été assassiné.e.s entre le 1er janvier 2016 et le 10 janvier 2019. Dans les 100 premiers jours du gouvernement d’Ivan Duque, 120 dirigeant.e.s sociaux ont été assassiné.e.s. Tous les trois jours, un.e dirigeant.e social.e en Colombie est assassiné.e. Plus de quatre mille dirigeant.e.s sont protégé.e.s par l’unité nationale de protection (UNP), c’est-à-dire sont en danger d’être assassiné.e.s. Isabel Cristina Zuleta est une d’entre elles. Elle ne compte plus le nombre de fois qu’elle a reçu des menaces (Entrevista con Isabel Cristina Zuleta, Daniela García Castaño. Mai 8 2019).

Aujourd’hui, devant le Parlement du Canada, nous tenons à vous présenter −parmi tant d’autres, trois cas qui lient le Canada et les entreprises canadiennes à cette dramatique situation en Colombie : la lutte inlassable d’Isabel Zuleta contre le néfaste mégaprojet HIDROITUANGO, qui compte d’importants capitaux de la Caisse de dépôt et placement du Québec (CDPQ) ; la lutte de Francia Márquez, remarquable leader de la communauté afrocolombienne, Prix Goldman Environnemental en 2018, attentat dans lequel était présente la professeure canadienne Sheila Gruner ; et le cas de la minière Tobie Mining, qui en se prévalant de la perverse clause d’investissement conçue par l’ALÉNA Canada-Colombie, prétend saccager la colossale somme de 16,5 milliards de dollars US au détriment du trésor public national.

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Permettez-nous de vous demander, Mesdames et Messieurs, est-ce quelqu’un.e dans ce Parlement serait prêt.e à risquer sa vie pour défendre l’eau? Est-ce que quelqu’un.e dans ce Parlement serait prêt.e à risquer sa vie pour défendre son territoire ? Est-ce que quelqu’un.e dans ce Parlement serait prêt.e à risquer sa vie pour défendre les droits de la communauté ?

Tous les jours, Isabel Cristina Zuleta –leader de Rios Vivos– risque sa vie pour défendre l’eau, le territoire, les droits de la Communauté. Elle lutte contre HIDROITUANGO, un mégaprojet hydroélectrique qui compte sur un important financement canadien.

Selon la revue d’affaires Portafolio de Colombie, Roberta Brzezinski, administratrice principale des marchés émergents de la Caisse de dépôt et de placement du Québec (CDPQ), affirme que cette entité québécoise a octroyé une ligne de crédit de 1,0 milliards de dollars US à HIDROITUANGO (Llegarán recursos canadienses al proyecto Hidroituango, Portafolio, 11 janvier 2018).

Le mégaprojet hydroélectrique HIDROITUANGO a été imposé avec une grande violence en Colombie. On cherchait à dissiper le territoire et à abaisser les coûts de production associé à des indemnités, déplaçant avec violence les populations établies dans le fleuve Cauca, le deuxième le plus important de la Colombie dont dépendent près de 10 millions de personnes. Selon certaines sources, dans les 12 municipalités touchés par HIDROITUANGO, les paramilitaires ont perpétré 62 massacres (Contagio Radio, mardi le 23 janvier 2018). D’autres sources parlent de « 100 massacres, d’assassinats et de disparitions forcées » (La muerte de Hugo y Luis, dos líderes que se enfrentaban a Hidroituango, Semana, 14 mai 2018). Avec l’inondation du canyon du fleuve Cauca, la société Empresas Publicas de Medellin (EPM) cherche à enterrer la vérité : « On estime qu’il y a entre 300 et 600 victimes enterrées des 62 massacres commis par des paramilitaires » (Contagio Radio, mardi le 23 janvier 2018).

La dernière ordonnance qu’a signé Álvaro Uribe Vélez – l’ancien président aujourd’hui sénateur de la Colombie− avant de quitter son poste de gouverneur d’Antioquia en 1997, a été la création de la Société hydroélectrique Ituango. Cette même année a eu lieu le massacre de l’Aro (Luis Monténégro, Collectif d’avocats José Alvear Restrepo). Selon William de Jesús Gutiérrez, militant de Ríos Vivos-Antioquia, « Álvaro Uribe a coordonné une série de meurtres et de massacres dans la région du Cauca, province d’Antioquia, afin d’imposer le projet HIDROITUANGO » (Vidéo).

Le 15 mai 2019 − 10 ans après que le Parlement canadien eut ratifié l’ALENA Canada-Colombie, signé par Uribe et Harper − l’ancien Procureur général Eduardo Montealegre a alerté le pays à propos des enquêtes nationales et internationales contre l’ex-Président Uribe, à qui l’on attribue des crimes contre l’humanité au cours de sa « sombre administration », et il a assuré que dans les prochains jours il déposera un rapport d’enquête approfondie qui démontrera la responsabilité du sénateur Álvaro Uribe Velez dans les massacres de l’Aro et de la Granja (Humana Radio, le 15 mai 2019).

Isabel Zuleta résume ainsi la crise actuelle des communautés touchées par ce néfaste mégaprojet hydroélectrique : « Bien que nous souffrons de la terrifiante manière dont l’EPM et l’ANLA (Autorité nationale des permis environnementaux) ont méprisé toute la beauté du territoire, ont détruit la culture, la communauté, la pêche, l’extraction artisanale de l’or, la tranquillité, la forêt, les animaux… nous n’avons JAMAIS imaginé qu’ils pourraient en arriver au point de SUSPENDRE la vie, de semer la détresse avec le marteau sans avenir. Plus d’un an sans savoir ce que deviendra ce vaste territoire, comme si la Colombie nous avait oublié ou simplement comme si nous n’étions pas de la Colombie » (Colombia carece de consenso social sobre lo inadmisible, Semana Sostenible, 19.05.24).

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Le 4 mai 2019, Francia MÁRQUEZ, remarquable leader de la communauté afrocolombienne, récipiendaire du Prix Goldman Environnemental en 2018, avec un groupe de 15 personnes, a survécu à un attentat contre sa vie dans la région du Cauca, Colombie (Semana, Contagio Radio, El Tiempo, El Espectador, France24). Il est implicite que cet attentat est associé à des accusations récentes et graves de l’ex-président et aujourd’hui sénateur Álvaro Uribe Velez, par lesquels il incite à massacrer les membres de la Minga, selon dénonciation de Luis Fernando Arias, conseiller de l’ONIC (Luis Fernando Arias, conseiller principal de l’ONIC).

« Si l’on accuse l’autorité sereine et ferme qui applique une approche sociale de causer un massacre, c’est parce l’autre côté fait preuve de violence et de terreur, au lieu de simplement protester », a déclaré le sénateur Uribe dans un Tweet le 7 avril de 2019, environ un mois avant cet attentat.

Dans cet attentat était présent Sheila Gruner, professeure associée de l’Université Algoma (Ontario, Canada) et professeure invitée de l’Université Javeriana (Bogota). La professeure Gruner raconte son expérience dans ce grave attentat :

« L’attentat −avec des grenades et fusillade− était dirigée contre certains des dirigeant.e.s sociaux les plus importants du mouvement noir, ethnique et territorial en Colombie. Francia Márquez représente la mobilisation des femmes d’ascendance africaine pour la protection de la vie et les territoires ancestraux. Carlos Rosero, membre du Processus de communautés noires (PCN), a joué un rôle essentiel dans l’élaboration de la Loi 70 de 1991. Il est un dirigeant d’une grande reconnaissance à l’intérieur et à l’extérieur du mouvement noir. Là aussi se trouvaient réuni.e.s d’importantes femmes et hommes appartenant à des organisations reconnues au niveau régional, national et international, y compris Victor Hugo Moreno Mina, conseiller de l’Association des conseils communautaires du nord du Cauca (ACONC), et Clemencia Carabalí, de l’ Association de femmes afro-descendants du nord de Cauca (ASOM) et du Mouvement national social et politique des femmes noires, afro-colombiennes dans leurs diverses identités, entre autres. Trois des dirigeant.e.s bénéficiaient déjà de mesures de sécurité (véhicules blindés et escortes) parce qu’ils et elles avaient déjà reçu des menaces de mort en raison du travail qu’ils et elles accomplissent dans le pays en matière de droits humains, ethniques et territoriaux. Grâce à la réaction de leurs escortes, ils et elles ont réussi à éviter un massacre. Trois mineurs étaient présents, y compris une fillette de trois ans. Tous les dirigeant.e.s présent.e.s font partie du Conseil national de la paix afro-colombienne (CONPA), lequel a joué un rôle clef en tant que réseau de la Commission ethnique pour la paix et les droits territoriaux, dans le développement et l’insertion du chapitre ethnique de l’Accord final de paix. Cette agression armée est considérée comme un attentat contre la paix, contre le chapitre ethnique et une tentative d’effacer les progrès importants du mouvement noir en ce qui concerne les droits politiques et territoriaux obtenus au cours des deux dernières décennies. »

« Le nord du Cauca est une zone où sont menées des activités minières illégales et inconstitutionnelles (sans consultation préalable, libre et informée des communautés) et où la production illégale de coca augmente. C’est une région marquée également par de mégaprojets et des parcs industriels. Les dirigeant.e.s et les organisations présentes ce jour-là se battent depuis des années pour en finir avec les activités économiques illicites et préjudiciables sur leurs territoires et communautés. Elles font aussi partie de la Minga − une importante mobilisation pour demander au gouvernement national de respecter les accords conclus en 2016. Le 4 mai, elles étaient réunies pour préparer une négociation avec le gouvernement colombien qui aurait lieu quelques jours plus tard afin d’exiger le respect des accords conclus précédemment. Le gouvernement national a réagi à l’attentat du 4 mai en offrant plus de mesures de sécurité, mais il n’a pas la volonté de s’attaquer aux causes de la violence dans cette région du pays. Il n’a pas rempli son devoir de doter la loi 70 de sa réglementation, de respecter l’ordonnance 005 et de mettre en œuvre le chapitre de l’accord sur les communautés ethniques ».

Très peu de temps après cette attaque, un.e des porte-paroles a reçu une menace de mort : « ceci n’a été que le début de ce qui sera l’extermination de vous tous.tes. » (Semana, 6 mai 2019).

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La perverse clause d’investissement conçue dans l’Accord de libre-échange Canada-Colombie permet aux minières canadiennes de présenter des demandes léonines contre l’État colombien. La canadienne Cosigo Resources (Tobie Mining) a poursuivi la Colombie pour la colossale somme de 16,5 milliards de dollars, équivalant à environ 50 billions de pesos, ou un cinquième du budget national en 2017. Après avoir « investi » seulement environ 20 mille dollars, cette société minière dénonce une prétendue « expropriation » d’un titre minier qui est sans effet étant donné qu’il a été octroyé pour un secteur du parc national Yaigoje-Apaporis et que quelques jours plus tard, l’autorité environnementale colombienne l’a retiré. Selon les estimations de la transnationale, ses intérêts économiques seraient équivalentes à cette somme colossale (La minera que pide 16.500 millones de dólares de indemnización a Colombia. Semana, 6 novembre 2017). La Tobie Mining n’aura l’or pas qu’elle envisageait d’exploiter pendant 20 ans, mais maintenant elle cherche à partir avec cette somme d’argent que représente 20 années d’extraction de l’or.

Selon Francia Márquez, « en 2016, dans le département du Cauca, il y avait 236 titres miniers, couvrant 40 % du territoire, principalement dans le massif colombien, sur des terres des Autochtones et des Colombiens d’ascendance africaine. Les entreprises extractives nous expulsent de nos territoires. Lorsque les communautés gagnent des litiges, comme par exemple, lors de la consultation préalable, (comme c’est le cas de La Toma, municipalité de Suárez, arrêt T1045A de 2010, où la Cour a annulé la licence d’AngloGold Ashanti), nous avons commencé à recevoir des menaces de mort qui m’ont contrainte à quitter mon territoire. Lorsque la justice tranche en faveur de la communauté, les assassinats, les déplacements forcés et la stigmatisation des dirigeant.e.s par les acteurs armés augmentent. La persécution judiciaire par l’État augmente dans le but d’assurer les intérêts des entreprises. En plus de nous chasser de notre territoire et de détruire nos vies, ces entreprises minières veulent que nous les payions pour cette destruction. Avec les 50 milliards qui serviraient à ‘compenser’ Tobie Minning, on aurait pu dédommager toutes les victimes du conflit armé de la région du Pacifique en Colombie (Interview 19.05.27).

¡Une bataille perverse de l’Accord de ‘libre’-échange Canada-Colombie! Combien de désolation et de mort cette colossale spoliation financière de l’État colombien produit-elle ?

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La vague actuelle d’assassinats des dirigeant.e.s sociaux en Colombie peut être qualifié de génocide. Son ampleur dépasse celle contre l’Union patriotique dans les années 80 et 90 qui a coûté la vie à plus de 1 500 membres de ce mouvement politique dans tout le pays. L’ancien président Juan Manuel Santos, ex-Ministre de la défense d’Uribe, a reconnu la responsabilité de l’État dans cette persécution, assassinat et disparition de centaines de ses membres et sympathisant.e.s :

« Je voudrais aujourd’hui, dans cet acte public, en tant que Président de la République et Chef de l’État, déclarer que l’extermination et la disparition de l’Union patriotique n’aurait jamais dû se produire et reconnaître que l’État n’a pas pris des mesures suffisantes pour prévenir et empêcher les massacres, les attentats et les autres violations, malgré les preuves flagrantes que cette persécution était en cours ». (Exterminio de la UP fue un genocidio. Verdad Abierta, 15 septembre 2016).

La Colombie n’est pas une démocratie. Non ! En Colombie, nous avons vécu la dictature la plus sanglante sous Álvaro Uribe Velez, ancien président et actuel Sénateur de la Colombie « accroché au pouvoir pour que le pouvoir le protège »:

« Les massacres d’El Salado et de l’Aro, les faux positifs, Barrancabermeja, Tierralta, Chengue, Montes de María, Tame, Saravena, Soacha, Ituango, l’opération Orion; les millions de mort.e.s vivant.e.s dans les hôpitaux; l’assassinat de centaines de dirigeant.e.s et de paysan.ne.s qui tombent sous les balles et en raison de la fumigation systématique du glyphosate ou de leur appartenance à des partis d’opposition; les forêts rasées pour le bétail et les millions de personnes déplacées, forcées à mourir dans les villes et les villages; et l’assassinat de plus de 2 000 femmes à ce jour cette année » (La dictadura más sangrienta. Beatriz Vangas Athías, professeure de l’Université Javeriana. El Espectador, 2 mars 2019).

Tous les trois jours, ils tuent un.e défenseur.e social.e en Colombie. Depuis la signature de l’Accord de paix − le 1er janvier 2016 − ils ont assassinés 508 leaders sociaux en Colombie : des défenseur.e.s des droits humains, de la vie du territoire, de la substitution des cultures illicites, de requérant.e.s de terres. Depuis la signature de l’Accord de paix, nous constatons une augmentation des actes de violence et des assassinats de défenseur.e.s des droits humains en Colombie. Selon le Rapport annuel 2018, du Programme nous sommes défenseur.e.s, en 2013 366 actions violentes ont été recensées, 626 en 2014, 682 en 2015, 481 en 2016 et 560 en 2017. En 2018 ils auraient dénombré 805 actions violentes. Selon cette même source, en 2018 il y a eu 155 assassinats, ce qui représenterait une augmentation de 43,75 % par rapport à 2017.

La communauté internationale, les organismes de droits humains, les organisations civiles et les gouvernements démocratiques, nous constatons avec une grande préoccupation l’escalade de la guerre de faible intensité, à laquelle la population civile en Colombie est aujourd’hui soumise à nouveau, comme pendant les deux périodes du néfaste gouvernement Alvaro Uribe Velez, de 2002-2010.

Selon Erika Rojas, rapporteuse d’Amnesty International pour les Amériques, « l’assassinat de ceux et celles qui défendent les droits humains est en train de détruire le tissu social des communautés qui historiquement ont subi les cruelles conséquences du conflit armé, et celles-ci sont maintenant plus à risque à cause de la réorganisation des groupes paramilitaires qui se sont recyclés et réapparaissent avec force, en revivant les souffrances causées dans le pays. » Amnesty International, l’ONU et la Croix Rouge Internationale ont attiré l’attention sur la situation fragile des défenseur.e.s des droits humains.

Le président Iván Duque, au pouvoir depuis moins d’un an, a favorisé une stratégie essentiellement de militarisation du territoire colombien dans le cadre de la soi-disant « paix avec légalité ». En dépit de la militarisation, les groupes paramilitaires agissent presque en toute liberté; ils menacent non seulement les dirigeant.e.s sociaux mais aussi les opposant.e.s politiques, comme ce fut le cas des membres du mouvement politique d’opposition « Colombia humana » et de nombreux paysan.ne.s qui défendent le territoire, qui exigent le respect de l’accord de paix, ou des dirigeant.e.s de processus communautaires pour la défense de leurs communautés.

Selon le rapport des droits humains dans le contexte de l’Accord de libre-échange Canada-Colombie (ALÉ- CC), l’impunité en Colombie est une des plus élevées au monde alors que le pays occupe le 9e rang de tous les pays. Les autorités judiciaires ne font pas leur travail d’enquête et de poursuite des auteurs intellectuels, ce qui a pour effet d’accroître les actions criminelles contre les leaders sociaux.

Le parti au pouvoir s’attaque systématiquement aux défenseur.e.s des droits humains et aux dirigeant.e.s sociaux, stigmatise leur contestation et entrave le développement des institutions conçues pour réaliser la paix. Ce rapport concernant l’ALÉ-CC indique que leurs actions suscitent de sérieux problèmes de sécurité pour les gens qui dans les régions continue à soutenir le processus de paix.

Un récent article du New York Times rapporte que la répression de l’Armée colombien a atteint un niveau similaire à celui de la période d’Alvaro Uribe Velez, une répression menée par l’armée colombienne qui a causé le meurtre de milliers de jeunes innocent.e.s, des victimes innocentes qui étaient ensuite présentés comme des guérillerxs mort.e.s au combat (Colombian Army’s Kill orders put civilians at risk, Officers say. New York Times, mai 18 2019).

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Tout au long du processus d’adoption de l’Accord de libre-échange Canada-Colombie (ALECCO) par le Parlement canadien, SOS-Colombie, une coalition de divers mouvements et organisations sociales et syndicales du Québec et du reste du Canada, avec l’appui de partis politiques d’opposition, principalement le Nouveau Parti Démocrate (NPD) et le Bloc Québécois, se sont opposé.e.s avec fermeté à cet Accord.

 

« Ratifier un accord commercial avec le régime d’Uribe n’est pas la meilleure façon de donner la priorité aux droits humains et à la démocratie dans les Amériques: c’est nier les valeurs et les principes que nous défendons profondément », ont affirmé alors des représentant.e.s de SOS- Colombie. (Protestas en Montreal y Ottawa contra la visita de Uribe y contra El TLC Canadá- Colombia, 13 juin 2009).

Une semaine après la ratification de l’ALÉ Canada-Colombie, José Reinel Restrepo, prêtre de Marmato a été assassiné. Il « avait dirigé un mouvement civique à Marmato (avec les mineurs artisans) qui rejetait l’exploitation d’une mine d’or à ciel ouvert. Avec le comité pro-défense de Marmato, il avait encouragé les communautés à s’organiser pour s’opposer aux plans des grands exploitants. Son assassinat reste impuni. La minière canadienne Colombia GoldFields Ltd était derrière l’exploitation de l’or à Marmato. Cette compagnie espérait générer 20 milliards de dollars de chiffre d’affaires avec cette mine (Canadian mining in Colombia, documentaire de la CBC. 31 mars 2008).

Coïncidence ?

Le député Peter Julien (NPD) avait alors dénoncé devant le Parlement canadien le fait que le gouvernement de Harper déroulait le tapis rouge pour le régime d’Alvaro Uribe, avec l’appui des libéraux, même si ce régime avait, selon le député, le pire dossier du continent en matière de violation des droits humains. De plus, selon un rapport de l’Agence de renseignement des États-Unis, cet « homme politique s’est consacré à assurer la collaboration des hautes sphères du gouvernement avec le cartel de Medellin et était un ami personnel de Pablo Escobar » (U.S. Intelligence Listed Colombian President Uribe Among Important Colombian Narco-Traffickers in 1991).

L’extraction en Colombie −d’or, de charbon, de bois, etc.− s’est intensifiée après la signature de l’Accord de libre-échange Canada-Colombie, ce qui a exacerbé la violence contre les dirigeant.e.s et les communautés opposé.e.s à ces activités. Tel qu’il a été conçu, cet Accord contribue au pillage des ressources de notre pays, à l’appauvrissement des communautés, à la destruction de l’environnement et à l’exacerbation de la violence.

Le gouvernement du Canada ne devrait-il pas se préoccuper sérieusement de ses investissements en Colombie ? Ne devrait-il pas protéger non seulement ses intérêts économiques mais aussi contribuer à protéger la vie et les droits des Colombien.ne.s?

Lorsque les affaires sont propres et durables, lorsqu’elles sont menées avec des partenaires honnêtes, et ont pour but le bénéfice mutuel et la recherche du bien commun, il est même possible de jouer un rôle positif au-delà des entreprises, dans le développement de la société en général. Mais lorsque l’on fait affaire avec des partenaires douteux, impliqués dans des graves crimes contre l’humanité, dans la violence, le pillage des ressources, le déplacement et la destruction de communautés, ne devrait-on pas se demander si l’on est plutôt complice?

Quel rôle les dirigeant.e.s politiques de ce Parlement souhaitent jouer face à ce génocide ? De quelle côté de l’histoire le gouvernement canadien veut-il être ?

Nous demandons au Parlement et au gouvernement canadien d’agir avec toute l’efficacité possible pour assurer la protection de la vie et des droits humains des défenseur.e.s des droits humains en Colombie exposés à la violence inhérente aux projets miniers en Colombie et à tout processus commercial bilatéral qui se développe entre nos pays.

¡LA VIE ET LES DROITS DE L’HOMME SONT PLUS IMPORTANTES QUE LES AFFAIRES!

En conséquence, les organisations colombiennes ici signataires, nous demandons à l’Honorable Parlement du Canada et des Amériques :

– de réaliser une séance d’urgence sur les droits humains en Colombie

– de créer une Commission de vérification des engagements pris par la Colombie en matière de droits humains avec la signature de l’Accord de libre-échange Canada-Colombie, lesquels sont contenus dans les rapports annuels des droits humains, depuis la signature de l’Accord, le 21 novembre 2008 et son entrée en vigueur le 15 août 2011.

– Nous demandons la réouverture du programme de refuge pour les dirigeant.e.s colombien.ne.s qui sont menacé.e.s et en danger de mort en Colombie.

– Nous demandons aussi qu’un suivi, un contrôle et une surveillance soient faites des dommages économiques, sociaux et environnementaux causés aujourd’hui par des entreprises et minières canadiennes dans certaines régions de Colombie. Ces dommages font l’objet de plaintes de la part de défenseur.e.s des droits humains qui mettent leur vie en danger. Le gouvernement canadien ne doit pas rester indifférent à cette situation et il doit demander à l’Ombudsman d’enquêter sur les sociétés minières canadiennes à l’étranger.

 

Organisations signataires

Ríos Vivos Colombia

Asociación de Barequeros del Bajo Cauca ABC

Asociación de pequeños mineros y pescadores de Puerto Valdivia AMPA

Asociación de Pescadores Unidos del Barrio la Esperanza Caucasia ASOPESCA

Asociación de Víctimas y Afectados por Megaproyectos (ASVAM)

Asociación de Víctimas y Afectados por Megaproyectos de las veredas Orejón, Chiri y Buena Vista de

Briceño (ASVAM ORCHIBU)

ASOMIAVAL Asociación de pequeños mineros artesanales de Valdivia

ASOMINSAB Asociación de barequeros, pescadores y agricultores de Sabanalarga

ASVAM Briceño

ASVAM El Aro

ASVAM Ituango

ASVAM Puerto Valdivia

ASVAM San Andrés

ASVAM Toledo

Bocachicos Asociación de pescadores, Barequeros y agricultores del K14 y k15 de Valdivia

Arnold August, periodista y escritor, especialista en América Latina, Montreal

Asociación de Víctimas del Conflicto Colombiano – Canadá (ASOVICA)

Cabildo indígena Káamash Hu de Barranquilla

Colectivo de Coordinación de Acciones Socio Ambientales – Colectivo CASA (Bolivia)

Colombia Conciente

Colombia Humana New Jersey

Colombia Humana New York

Colombian Action Solidarity Alliance – CASA

Comité pour les droits humains en Amérique latine (CDHAL)

Comité international pour la VIE et les droits humains en Colombie (CIVDH)

Foro Internacional de Víctimas – Capítulo Canadá

Juventud Ecologista en Acción – JEA 2.0

NORDIK Institute, Algoma University

Proceso de Comunidades Negras

Projet accompagnement solidarité Colombie (PASC)

RED ALAS BOLIVIA

Red Nacional de Mujeres en Defensa de la Madre Tierra – RENAMAT

Somos Uno Solo / Arraigo

Víctor Daniel Beltrán Escobar, Líder Social, Miembro de ACONC (Asociación de Concejos Comunitarios del Norte del Cauca)