Publié par Paloma Martínez Méndez, Radio Canada International, le 28 novembre 2025
Deux ans après la décision de la Cour suprême du Panama, qui a déclaré inconstitutionnelle la loi autorisant les activités de la mine Cobre Panamá, appartenant à la société canadienne First Quantum Minerals, le gouvernement panaméen a annoncé que l’audit complet demandé donnerait bientôt des résultats et que la mine pourrait rouvrir.
CORRECTION : Une version corrigée de cet article a été publiée le 3 décembre 2025. Contrairement à ce qui avait été rapporté, la société First Quantum Minerals n’a pas violé la Constitution du Panama. C’est la loi autorisant les activités de la mine qui est inconstitutionnelle. Nous ajoutons également que l’entreprise a décidé de suspendre ses recours internationaux contre le Panama et qu’elle nie avoir été sanctionnée pour des raisons environnementales.
La question de la mine « est examinée de manière très responsable par mon gouvernement, afin de faire les annonces pertinentes (…) je suis convaincu que cela se fera au cours du premier trimestre de l’année prochaine », a déclaré le président du Panama, José Raúl Mulino, lors de sa conférence de presse hebdomadaire le 27 novembre.
Plus tôt dans la semaine, Alfredo Burgos, directeur national des ressources minières du Panama, a annoncé que l’audit complet, dont le premier rapport sera publié début décembre, s’achèvera fin février.
Nous espérons que toutes ces informations nous permettront de nous assurer du bon déroulement de l’exploitation de cette mine et de prendre les décisions qui s’imposent, a ajouté M. Burgos.
Le fonctionnaire a également indiqué qu’une éventuelle réouverture des opérations minières prendrait entre un an et demi et deux ans pour atteindre le niveau fonctionnel de 2023.
Ces deux déclarations aux médias locaux ont été faites deux ans après que la Cour suprême du Panama ait ordonné la cessation des activités de la mine, dans l’attente d’un audit complet. La mine appartient à First Quantum Minerals, dont le siège social est situé à Vancouver, au Canada.
La décision de la Cour suprême
En novembre 2023, la plus haute juridiction du Panama a déclaré inconstitutionnelle la loi approuvant le contrat de concession minière sans appel d’offres entre l’État du Panama et Minera Panamá (filiale de First Quantum Minerals).
Selon la Cour suprême, cette loi enfreint 25 articles de la Constitution, notamment ceux relatifs à la protection de l’environnement et aux droits des enfants.
Fragilité environnementale : implications juridiques et sociales
Dans une interview accordée à RCI, Joana Ábrego, directrice juridique du Centre d’action environnementale du Panama (CIAM), a expliqué que depuis des années, son organisation demande la fermeture définitive du projet Cobre Panamá en se basant sur des décisions judiciaires antérieures.
Dans son arrêt, la Cour reconnaît les effets directs de l’exploitation minière sur une population vulnérable, principalement les communautés rurales.
En ce qui concerne les impacts et les risques environnementaux du projet minier, Mme Ábrego a expliqué à RCI qu’en 2011 déjà, l’étude d’impact environnemental préalable à l’exploration et à l’exploitation de la mine avait détecté la présence dans cette zone, connue sous le nom de Corridor biologique mésoaméricain, de plus de 250 espèces menacées, rares et endémiques.
Minera Panamá a été sanctionnée à 11 reprises par le ministère de l’Environnement entre 2020 et 2023 à la suite d’inspections menées en 2013 dans les installations de la mine, avant que First Quantum n’en devienne propriétaire.
Malgré des amendes d’un montant total de 21 813 balboas (30 500 dollars canadiens), les procédures elles-mêmes n’impliquaient aucune infraction ni aucun dommage à l’environnement. Il est faux d’affirmer cela. Elles concernaient des activités spécifiques d’audit du site, a expliqué à RCI le porte-parole de First Quantum Minerals, Brian Cattell.
Concernant l’audit complet en cours, demandé en 2025 par le ministère de l’Environnement du Panama, la responsable juridique du CIAM a également exprimé ses inquiétudes quant aux critères d’évaluation. En septembre, son organisation et le comité technique du mouvement Panama Vale Más Sin Minería (Le Panama vaut mieux sans exploitation minière) ont demandé une correction urgente des paramètres de l’audit.
Notre intention n’est pas d’attaquer ou d’entraver le bon déroulement de l’audit. Nous avons insisté pour que ce processus soit mené à bien, car il s’agit d’une étape nécessaire pour connaître la vérité sur l’impact de ce projet minier et pour nous défendre contre les arbitrages internationaux qui pèsent sur le pays. Citation de Joana Ábrego, directrice juridique du Centre d’action environnementale du Panama (CIAM)
James Devas, directeur des relations d’entreprise chez First Quantum Minerals Ltd., a souligné que, depuis la suspension des opérations par le gouvernement panaméen, la priorité absolue de First Quantum a été la gestion adéquate de l’environnement et de la biodiversité du site minier, ainsi que la participation de la communauté à ses consultations et à ses préoccupations.
Selon M. Devas, l’entreprise a engagé des coûts d’au moins 311 millions de dollars dans son programme de maintenance et de stabilité depuis la suspension, sans générer de revenus pour couvrir ces coûts, et qu’elle se concentre sur la mise en œuvre du plan de préservation et de gestion sécuritaire, qui aurait été présenté en janvier 2024 et approuvé par le gouvernement panaméen en mai 2025.
Le 20 novembre, le président-directeur général (PDG) de First Quantum Minerals, Tristan Pascall, a accordé une interview au site web Mining.com au sujet de la mine située au Panama.
Dans cette interview accordée au site web dédié à l’industrie minière et métallurgique mondiale, le PDG de First Quantum Minerals a souligné que, bien que l’entreprise continue de se développer, sa priorité actuelle est de résoudre le conflit par le dialogue et de rétablir la confiance du public.
Il a ajouté que l’entreprise considère ses actions, telles que l’expédition des 121 000 tonnes de cuivre qui n’ont pas pu être transportées ni vendues pendant un an et demi en raison de la fermeture de la mine, comme des mesures visant à reconstruire la relation avec les communautés.
Le PDG de First Quantum Minerals a déclaré qu’une partie (35 000 tonnes) de ces produits avait été expédiée dans un premier navire vers les installations d’Aurubis AG, une entreprise allemande qui possède plusieurs fonderies en Europe. Le reste du concentré bloqué devrait être expédié à des partenaires commerciaux (offtake partners) au Japon et en Corée du Sud.
Tristan Pascall a déclaré dans cette interview que chaque mesure de ce type renforce la confiance dans la possibilité de trouver une voie à suivre ensemble, tout en affirmant que, en fin de compte, l’avenir de la mine est directement lié aux résultats de cet audit complet, qui jettera les bases de toute négociation avec le gouvernement.
MiningWatch Canada et la pression internationale contre Cobre Panamá
En 2024, plus de 100 organisations civiles internationales, par l’intermédiaire de MiningWatch Canada, ont demandé au gouvernement canadien de retirer son soutien à First Quantum Minerals et de faire pression pour que la mine au Panama soit fermée.
Face à la possibilité de sa réouverture, Viviana Herrera, responsable de MiningWatch pour l’Amérique latine, a expliqué à RCI que First Quantum Minerals avait déposé une plainte d’un montant de 20 milliards de dollars américains (27,891 milliards de dollars canadiens), suspendue depuis mars, afin de faire chanter le gouvernement panaméen.
En novembre 2023, First Quantum a engagé une procédure d’arbitrage devant la Cour internationale d’arbitrage de la Chambre de commerce internationale (CCI) et a déposé une notification d’intention d’arbitrage en vertu de l’Accord de libre-échange entre le Canada et le Panama (ALE). Cependant, en mars 2025, l’entreprise a accepté de « mettre fin à l’arbitrage de la CCI » et de « suspendre l’arbitrage de l’ALE ». L’entreprise affirme avoir pris cette mesure pour démontrer son engagement à continuer de faire partie de la solution.
En février 2024, Tristan Pascall a déclaré à Reuters qu’il avait « fixé le montant minimum réclamé dans cette procédure à 20 milliards de dollars » après que la Cour suprême du Panama eut déclaré inconstitutionnel le contrat de First Quantum.
Cependant, le PDG de la société a également déclaré à ce moment-là que l’arbitrage n’était pas la solution privilégiée par l’entreprise.