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Colombie : Risque imminent pour la vie, la sécurité, l’intégrité et la survie des populations autochtones déplacées à Ciudad Bolívar

Bakatá, 26 mars 2021. Les déplacements dus à plus de 60 ans de conflit armé en Colombie ont coûté la vie à des milliers de nos frères et sœurs autochtones qui ont été tué.e.s ou sont tombé.e.s entre deux feux, perdant leurs territoires, souffrant de la faim et de la maladie. Aujourd’hui, en Colombie, des peuples entiers et des communautés autochtones sont au bord de l’extermination physique. 

L’Observatoire des Droits Humains de l’ONIC enregistre que, depuis la signature de l’Accord de Paix, la séquestration et le déplacement forcé, avec 51,6% et 30,0% respectivement, ont eu le plus grand impact sur les multiples violations des droits des peuples. Du 1er janvier au 9 mars de cette année, 2 960 victimes de séquestration et 677 victimes de déplacement massif ont été enregistrées, sur un total de 3 674 victimes de différentes violations. C’est pourquoi nous affirmons que nous sommes des victimes directes des violations permanentes des droits humains et des infractions au droit humanitaire international commises par tous les acteurs étatiques et armés illégaux et nous savons que derrière cette réalité douloureuse et tragique se cache l’intérêt des grandes entreprises pour le trafic de drogue, l’extractivisme minier et énergétique et l’agrobusiness sur nos territoires. 

L’intensification du conflit, qui suivit la signature de l’accord de paix et l’échec de la mise en œuvre du gouvernement actuel d’Iván Duque, met en danger la vie, l’intégrité, la liberté et la survie des peuples autochtones. En raison du fléau des déplacements, notre survie est menacée.

Le déplacement forcé vécu par la nation Emberá, pour parler d’un cas spécifique, s’est produit depuis 2001. Et bien que plusieurs familles ont pu retourner sur leurs territoires, dans les années suivantes elles sont retournées dans la ville de Bogotá,en raison du risque imminent, du manque de garanties, de la reconfiguration de la violence, de la présence de nouveaux acteurs armés, de nouveaux actes de violence et de la pose aveugle de mines terrestres pour obtenir le contrôle territorial et le contrôle des économies illégales par les acteurs armés.

Dans la ville de Bogotá, 393 personnes sont à un niveau élevé de risque et de vulnérabilité, faisant partie d’un total de 1235 familles et il n’existe toujours pas de voies de retour claires, ni de garanties de soins de santé, d’éducation, de logement, ce qui les placent dans une situation d’extermination physique, culturelle et territoriale imminente. À cette situation s’ajoute la crise sanitaire provoquée par la covid-19, qui fait que les familles ne peuvent plus vendre leurs objets artisanaux dont elles tirent leur subsistance quotidienne. 

Nous signalons que les familles ont de grandes difficultés à présenter leurs déclarations à l’unité des victimes, car il n’y a pas de traducteurs/traductrices pour faciliter cette procédure ; dans certains cas, les fonctionnaires, ne comprenant pas les demandes des familles, les envoient dans d’autres lieux, ce qui rend encore plus difficile le processus d’accréditation en tant que victimes et l’accès à leurs droits.

De même, nous informons l’État colombien et le Secrétaire général de Bogotá que 125 familles du peuple Emberá Katio, situées à Ciudad Bolívar, Barrio Brisa, Volador et El Paraíso, sont en danger de mendicité faute de paiement des loyers. Pour cette raison, nous tenons le Conseil pour les droits des victimes, la paix et la réconciliation, le secrétaire du gouvernement du district et la sous-direction des affaires ethniques pour responsables en cas d’expulsion des familles, ce qui constitue une nouvelle violation des droits du peuple Emberá. 

Par conséquent, nous lançons un appel URGENT aux institutions gouvernementales et au Secrétaire du District de Bogota, pour concevoir des plans de protection et de prise en charge collective des familles installées à Ciudad Bolivar, des itinéraires pour le processus de transition des familles qui ne souhaitent pas revenir par manque de garanties sur le territoire, en assurant une vie digne dans la ville de Bogotá en protégeant le droit fondamental au logement, à l’éducation, à la santé et à la sécurité alimentaire. Il est urgent de définir un itinéraire qui permette de manière RÉELLE et EFFICACE de garantir la sécurité, la protection et la stabilité socio-économique, celles qui jusqu’à présent ont été convenues avec les familles affectées et les victimes étant des solutions partielles, temporaires et sans approche ethnique ou culturelle.

Depuis l’Organisation Nationale Indigène de Colombie – ONIC nous exigeons que le Gouvernement National, le Ministère Public, le Secrétaire Général de la Mairie de Bogotá, le Conseil pour les Droits des Victimes, la Paix et la Réconciliation, le Secrétaire du Gouvernement du District, et la Sous-Direction des Affaires Ethniques assument les responsabilités constitutionnelles qui les obligent à donner une protection spéciale aux peuples en danger d’extermination.

Nous demandons à toutes les organisations de défense des droits humains, aux médias et au peuple colombien en général d’être solidaires de la situation des familles Emberá de la ville et de mettre en garde contre la grave crise humanitaire que vivent les peuples Emberá Chami et Eyábida et le peuple Wounaan en raison du conflit armé et de l’augmentation des économies illégales dans la région de Chocó, Antioquia et Risaralda, qui produisent déjà de nouveaux déplacements.

Nous avons insisté sur le respect des accords conclus entre l’ancienne guérilla des FARC-EP et l’État, et en particulier sur la mise en œuvre du chapitre ethnique comme moyen de sortir de cette grave situation. Nous exigeons également la reprise des pourparlers de paix avec l’ELN et d’autres groupes armés, afin de mettre un terme à la guerre qui laisse une trace douloureuse dans les territoires. 

COMPTEZ SUR NOUS POUR LA PAIX, JAMAIS POUR LA GUERRE !

#AlertaDerechosHumanos

Source article : ONIC

Source photo : Agenda Propia.