HomeCommuniquéDes organisations internationales dénoncent la violence contre la communauté autochtone de Zacualpan, Colima

Des organisations internationales dénoncent la violence contre la communauté autochtone de Zacualpan, Colima

À qui de droit,

Nous, les organisations internationales signataires, vous écrivons afin d’exprimer notre profonde inquiétude concernant la situation violente vécue par la communauté autochtone de Zacualpan et promue par le gouvernement de l’État et la représentante du bureau du procureur agraire à Colima, en lien avec les tentatives d’imposition d’activités d’exploitation minière sur le territoire autochtone.

Le Conseil autochtone de défense du territoire de Zacualpan et les membres de l’organisation de justice environnementale Bios Iguana A.C. font face, depuis deux ans, à des menaces et à un harcèlement constant, tel que documenté, en mars 2015, par la Mission d’observation nationale et internationale concernant le cas de Zacualpan. Ces faits ont été dénoncés en août 2015, devant la Commission interaméricaine des droits humains ainsi que devant plusieurs autres instances nationales et internationales. Ce scénario violent a été appuyé et défendu par l’État et les autorités fédérales qui ont, à plusieurs reprises, déployé les forces armées contre les communautés autochtones.

La représentante du procureur agraire à Colima, Maria Elena Diaz Rivera, a constamment agi de façon biaisée, favorisant le groupe qui appuyait l’industrie minière dans la communauté. Ce n’est pas un hasard que lorsqu’un groupe de membres de la communauté lui ait fait la demande de convoquer des élections en janvier 2014 afin de remplacer l’ancien commissaire communautaire, Carlos Guzman, qui tentaient d’imposer un projet minier à Zacualpan, elle ait refusé de le faire. Et ce, malgré le document qui lui avait été remis contenant plus de 160 signatures des membres de la communauté, accompagné des copies de leurs titres de propriété pour l’utilisation des terres communales à Zacualpan. À cette époque, les membres de la communauté voulaient remplacer Guzman puisque celui-ci n’avait pas inscrit au Registre national agraire les réunions communautaires durant lesquelles ils avaient déclaré leur opposition à l’exploitation minière depuis juin 2013.

Malgré cela, la communauté a continué à s’opposer à l’exploitation minière et elle a tenu, en février 2014, une assemblée, conformément à la Loi agraire. En présence d’un notaire public, ils ont renversé Carlos Guzmán, ont nommé un nouveau représentant de la communauté et ont déclaré leur « territoire libre d’exploitation minière ». L’acte de cette assemblée a été ratifié par M. Antonio Luis Betancourt Sánchez, magistrat du Tribunal agraire district 38, quand il a ratifié le nouveau représentant de la communauté. Cette décision n’a accordé au nouveau commissaire de la communauté que le temps restant au mandat de Carlos Guzmán. Suite à un appel décidé par la Cour d’appel du district de Colima, il a été déterminé que de nouvelles élections devraient être réalisées à la fin de cette période et qu’elles seraient convoquées par la représentante du Bureau du Procureur Agraire à Colima. Il est à noter que M. Betancourt a été démis de ses fonctions après avoir pris une décision en faveur de la communauté autochtone.

Lorsque la représentante du Bureau du Procureur Agraire, Mme Díaz Rivera, a convoqué des élections dans la communauté le 30 novembre 2014, elle a invité la police fédérale et a refusé d’autoriser la présence d’observateurs, de la presse ou de l’avocat du Conseil autochtone. Malgré cela, Taurino Rincón, le candidat soutenu par le Conseil autochtone de défense environnementale dans Zacualpan, a remporté les élections. L’élection du nouveau commissaire a restauré la gouvernance dans la communauté. Depuis son élection, il y a eu des assemblées communautaires périodiques et de la transparence dans la gestion des ressources communautaires. Pendant ce temps, la communauté a également déposé une injonction contre les concessions minières qui ont été imposées sur leur territoire autochtone, conduisant à la suspension de toute activité qui y a lieu jusqu’à ce qu’il y ait une décision finale dans cette affaire.

Ces actions pour la défense du territoire de la communauté se sont révélées être contraire aux intérêts de Mme Díaz Rivera, le gouvernement de l’État et d’autres groupes ayant des intérêts à imposer l’exploitation minière à Zacualpan. Une fois de plus, la représentante du Bureau du Procureur Agraire a convoqué des élections le 11 octobre 2015. Ceci a renouvelé les tensions et a aggravé les divisions au sein de la communauté, ce qui est contraire aux supposées responsabilités de cette autorité.

Le dimanche 11 octobre, en réponse à ces évènements, quelques 100 résidents de Zacualpan ont bloqué la route menant à leur communauté pour tenter d’empêcher l’assemblée que Mme Díaz Rivera avait convoquée, car, selon leur compréhension, cet acte constituait une intervention illégale de l’organisme fédéral dans leur communauté. En présence de la police fédérale et du procureur général, la représentante du Bureau du Procureur Agraire est arrivée au blocage et a affirmé qu’elle agissait en réponse à une pétition signée par d’autres résidents de la communauté. Lorsque les personnes présentes dans au blocage l’ont empêchée de continuer son chemin jusqu’à la communauté, elle a littéralement survolé le blocage à bord d’un hélicoptère de la police fédérale pour assister à l’assemblée de la communauté. Le quorum n’a pas été atteint pour l’assemblée, mais Mme Díaz Rivera a poursuivi la réunion pour relever de ses fonctions Taurino Rincón et a nommé un nouveau commissaire de la communauté. Elle a ensuite mis en ligne une vidéo de cette rencontre sur sa page Facebook. Dans la vidéo, il est évident que des personnes qui ne disposent pas d’un vote dans la communauté étaient présentes à la réunion et qu’un scrutin secret n’a pas eu lieu, parmi d’autres irrégularités. Heureusement, il n’y a pas eu d’autres affrontements ce jour-là. Cependant, un état de malaise persiste dans la communauté, en plus de la forte probabilité de nouvelles agressions.

En plus de son comportement partial et de ses interventions dans la vie de la communauté, Mme Díaz a également condamné publiquement les défenseur.e.s des droits humains, en contribuant à leur diabolisation et à leur criminalisation, mettant leur vie et leur santé mentale en danger, ainsi que leur capacité de continuer à exercer leur travail. Plus particulièrement, Mme Díaz a condamné publiquement l’organisation de justice environnementale Bios Iguana, l’accusant d’avoir créé des groupes terroristes, de cultiver des stupéfiants et, selon elle, d’essayer de déplacer des membres de la communauté de leurs terres dans le but d’en prendre le contrôle. En raison du climat de violence et d’hostilité qui a été créé, cette organisation a été incapable de mener à bien son travail dans la communauté et quand les membres de l’organisation ont essayé d’entrer dans la communauté, ils ont fait face à des menaces physiques et verbales, le tout avec la bénédiction de la police fédérale. Plusieurs membres de Bios Iguana ont dû fuir l’État et d’autres ont quitté l’organisation. Les membres du Conseil autochtone de défense environnementale de Zacualpan ont également fait face à des menaces de mort, ils ont été constamment surveillé par la police et ils ont fait face à une série d’agressions contre eux et leurs familles.

Compte tenu de ce qui a été mentionné, nous demandons au Secrétaire du développement agraire, territorial et urbain et le Chef du Bureau du Procureur Agraire d’ouvrir une enquête sur le comportement de la représentante du Bureau du Procureur Agraire à Colima, d’envisager son retrait et de déterminer sa responsabilité juridique en ce qui concerne ses actes intimidants, partiaux, illégaux et abusifs.

Signé par:

• Comité pour les droits humains en Amérique latine (CDHAL), Québec

• Gaia Foundation, U.K.

• Groupe de recherche sur les espaces publics et les innovations politiques, UQÀM

• Kalipunan ng Mga Katutubong Mamamayan ng Pilipinas (KATRIBU)/National

Alliance of Indigenous Peoples Organizations in the Philippines

• Latinamerican Mining Monitoring Program (LAMMP), U.K.

• London Mining Network, U.K.

• Maritimes-Guatemala Breaking the Silence Solidarity Network

• Mining Justice Alliance, Vancouver, Canada

• MiningWatch Canada

• Network in Solidarity with the People of Guatemala (NISGUA), U.S.

• Projet Accompagnement Solidarité Colombie

• Quebec Native Women

• Stop the Institute, Vancouver, Canada

• Victoria Central America Support Committee, Victoria BC

Versions en anglais et en espagnol aussi disponible sur le site de Mining Watch