HomeAction urgenteUne cinquantaine d’organisations et réseaux demandent au gouvernement de l’Équateur de mettre fin à la militarisation du territoire Shuar

Une cinquantaine d’organisations et réseaux demandent au gouvernement de l’Équateur de mettre fin à la militarisation du territoire Shuar

Près de cinquante organisations et réseaux internationaux ont fait parvenir la lettre ci-dessous aux autorités de l’Équateur le 19 décembre, exigeant la cessation immédiate de la militarisation du territoire du peuple Shuar et de l’état d’urgence décrété la semaine dernière dans la province de Morona Santiago, au sud-est de l’Amazonie équatorienne. Les groupes signataires demandent au gouvernement, dans l’objectif d’éviter de nouvelles violences, de lever immédiatement l’état d’urgence, de procéder au retrait des forces armées, et de revenir à un processus de dialogue avec les communautés affectées fondé sur le respect intégral des droits à l’autodétermination et au consentement libre, préalable et éclairé .

Pour plus d’informations sur la situation, lire notamment (en espagnol) les documents sur le site de la Confederación de Nacionalidades Indígenas del Ecuador-CONAIE et le communiqué de l’Asociación de Campesinos de Limón Indanza-ACLI et de la Coordinadora Campesina Popular-CCP .

 

Lettre du 19 décembre 2016

Dr. Patricio Benalcázar Alarcón
Defensoría del Pueblo de Ecuador

Javier Felipe Córdova Unda
Ministro de Minería

Abg. Cristina Silva Cadmen
Directora Ejecutiva, Agencia de Regulación y Control Minero (ARCOM)

Dra. Inés Arroyo
Subsecretaría de Tierras y Reforma Agraria

Dr. Galo Chiriboga Zambrano
Fiscalía General del Estado

Mesdames et Messieurs,

Les organisations signataires de cette lettre, qui oeuvrons pour la justice environnementale et la solidarité, vous écrivons afin d’exprimer notre profonde préoccupation quant à la militarisation, à la violence et à l’application de l’état d’urgence dans la province de Morona Santiago résultant des efforts pour imposer le projet minier de Panantza-San Carlos sur le territoire de la communauté autochtone Shuar de Nankints.

La communauté autochtone Shuar de Nankints a été expulsée par les forces armées en août 2016 afin de faciliter l’installation du projet Panantza-San Carlos de ExplorCobres S.A. Lorsque la communauté a cherché à récupérer son territoire à la fin novembre, la région a été militarisée. Ensuite, le 14 décembre, lorsque les forces policières et armées sont entrées dans cette zone,  apparemment sous l’ordre du procureur de district de Gualaquiza, les tensions ont mené à une confrontation violente qui a causé le décès d’un policier et blessé sept personnes.

L’entreprise ExplorCobres S.A. est une filiale des entreprises Corriente Resources et de CRCC-Tongguan Investment (Canada) Co., enregistrées au Canada, elles-mêmes filiales du consortium chinois CRCC-Tongguan. Ce consortium a acheté l’entreprise Corriente Resources et le projet Panantza-San Carlos en 2010.

L’entreprise ExploCobres S.A. devrait avoir perdu les concessions minières reliées au projet Panantza-San Carlos en raison du non-respect du Mandat minier de 2008, toujours en vigueur. Selon ce mandat, les concessions minières qui n’avaient pas fait l’objet d’une consultation préalable auprès des peuples affectés ou qui s’implantaient dans une zone comprenant des sources d’eau, parmi d’autres critères, devaient être révoquées sans aucune compensation financière. Pour ces motifs et plusieurs autres, le Contrôleur général a jugé que ce projet de cuivre, d’or et de molybdène ne respectait par le Mandat minier. De plus, dans la zone de 14 000 hectares où se trouvent les treize concessions minières,  le Contrôleur général a identifié plus de 400 sources d’approvisionnement en eau essentielles pour le peuple Shuar.

Il est important de mentionner que les entreprises canadiennes, parmi elles Corriente Resources, ainsi que l’Ambassade canadienne ont une responsabilité dans la non-application du Mandat minier de 2008. À l’époque où celui-ci fut adopté, l’Ambassade et les entreprises s’étaient battues  pour défendre les intérêts financiers de l’industrie contre l’état de droit de l’Équateur, et ce malgré les impacts nocifs de ces projets dans des zones écologiquement et culturellement sensibles, comme c’est le cas de la zone affectée par le projet Panantza-San Carlos.

Une autre irrégularité grave de ce projet s’est produite en 2011 lorsque le Ministère de l’Environnement a octroyé à l’entreprise un permis environnemental en se basant sur une étude d’impact environnemental menée dix ans plus tôt, alors qu’une autre Constitution et d’autres législations minière et environnementale étaient en vigueur.

Ce projet n’affecte pas seulement les communautés de Nankints, mais également 10 autres centres autochtones Shuar des associations de Tariamiat, d’Arutam et de Churuwia, tout comme de nombreuses familles agricultrices. D’autres centres Shuar et communautés agricoles se trouvent dans sa zone d’influence.

Nous déplorons profondément le décès du policier José Luis Mejía Solórzano et exprimons notre solidarité avec sa famille, ainsi qu’avec les personnes blessées lors des confrontations. Nous croyons que cette violence aurait pu être évitée.

Dans l’objectif d’éviter de nouvelles violences et d’assurer le bien-être des communautés touchées, nous vous demandons instamment de lever immédiatement l’état d’urgence, de procéder au retrait des forces armées et de l’entreprise présentes sur le territoire, et de revenir à un processus de dialogue avec les communautés affectées fondé sur le respect intégral de l’autodétermination des Shuar et de leur droit au consentement libre, préalable et éclairé inscrit dans la Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones, ainsi que dans d’autres accords internationaux et dans la jurisprudence.

Signataires de la lettre:

Alternatives au Développement Extractiviste et Anthropocentré (ALDEAH)
Amazon Watch, U.S.
Atlantic Regional Solidarity Network, Canada
Bios Iguana, México
CATAPA, Belgium
Centro de Documentación e Información Bolivia (CEDIB), Bolivia
CEIBA, Guatemala
Censat Agua Viva, Colombia
Cercle des Premières Nations de l’UQAM, Québec, Canada
Colectivo CASA, Bolivia
Colectivo Voces Ecológicas (COVEC), Panama
Comité Ambiental en Defensa de la Vida, Tolima, Colombia
Comité pour les droits humains en Amérique latine (CDHAL), Québec, Canada
Cooperacción, Perú
Defensa y Conservación Ecológica de Intag (DECOIN), Ecuador
Defensa del Ixofillmogen – Vancouver, Canada
Delhiin Mongol Nogoon Negdel (DMNN), Mongolia
Earth Law Center, U.S.
Environmental Defender Law Center (EDLC), U.S.
The Esperanza Project, U.S.
Friends of the Earth – Canada
Fundación Ecuménica para El Desarrollo y la Paz (FEDEPAZ), Perú
The Gaia Foundation, U.K.
GRUFIDES, Perú
Intercontinental Cry, Canada
Justiça nos Trilhos, Brasil
Justicia, Paz e Integridad de la Creación (JPIC), Chile
KAIROS: Canadian Ecumenical Justice Initiatives
Kalikasan Peoples Network for the Environment, Philippines
Kanaka, Ecuador
Listen To The Amazon, U.K.
McGill Research Group Investigation Canadian Mining in Latin America (MICLA), Canada
Mining Injustice Solidarity Network – Toronto, Canada
Mining Justice Action Committee – Victoria, Canada
Mining Justice Alliance – Vancouver, Canada
MiningWatch Canada
Movimiento Mesoamericano en Contra del Modelo Minero (M4), Regional
Movimiento Morelense Contra las Concesiones Mineras de Metales Preciosos, México
Observatorio de Conflictos Mineros de América Latina (OCMAL), Regional
Observatorio Latinoamericano de Conflictos Ambientales (OLCA), Chile
Otros Mundos Chiapas, México
Procesos Integrales para la Autogestión de los Pueblos (PIAP), México
Red Muqui, Peru
Red Mexicana de Afectados por la Minería (REMA), México
Servicios Internacionales Cristianos de Solidaridad con America Latina – Oscar Romero (SICSAL), Canada
United for Mining Justice, Canada